Question parlementaire sur l’impact du dispositif Garantie pour la Jeunesse

Monsieur le Président,

Conformément à l’article 83 du règlement de la Chambre des Députés, nous vous prions de bien vouloir transmettre la question parlementaire suivante à Messieurs les Ministres du Travail et de l’Education nationale et de la Jeunesse.

En avril 2013, le Conseil Européen de l’Union Européenne a recommandé aux Etats membres de « veiller à ce que tous les jeunes de moins de 25 ans se voient proposer un emploi de qualité, une formation conti­nue, un apprentissage ou un stage dans les quatre mois suivant la perte de leur emploi ou leur sortie de l’enseigne­ment formel. »[1] Ce dispositif dénommé Garantie pour la Jeunesse est depuis censé être un instrument de l’Union Européenne et de ses Etats membres dans la lutte contre le décrochage scolaire et pour une réduction du taux de pauvreté et d’exclusion sociale de la population européenne, notamment des jeunes âgés de moins de 25 ans.

Au Luxembourg, le plan de mise en œuvre de la Garantie pour la Jeunesse a été présenté en mai 2014 dans un contexte d’un chômage global de 7% et d’un chômage de jeunes se situant à 15,5%. Presque cinq ans après la mise en place de la Garantie pour la Jeunesse, le chômage des jeunes se situe toujours à 11,9%[2] et n’a pas diminué au même rythme que le chômage global qui se situe actuellement à 4,9%. En effet, il ressort des bilans de l’ADEM que – malgré une tendance positive – le nombre d’inscriptions à la Garantie pour la Jeunesse n’a pas sensiblement diminué depuis son entrée en vigueur et s’est situé à 3.237 en 2016 et à 2.014 pour les neufs premiers mois de l’année 2017[3]. En dépit de l’évolution du nombre de ses bénéficiaires, la mise en place de la Garantie pour la Jeunesse prévoit la création de nombreux programmes et offres à destination des jeunes ainsi que l’interaction de tout un éventail d’acteurs publics et privés et d’acteurs sociaux chargés de guider les jeunes demandeurs d’emploi dans leurs démarches.[4]

Le Ministère du Travail, de l’Emploi et de l’Economie sociale et solidaire est chargé de la coordination générale du dispositif et de tous les acteurs tandis que des agences publiques nationales et/ou locales (ALJ), sont responsables de la formation et de l’accompagnement des jeunes en vue de leur réintégration scolaire ou de leur intégration sur le marché du travail. En l’occurrence, l’ADEM est compétente pour les jeunes à la recherche d’un emploi, le Service de la Formation Professionnelle et l’Action locale pour jeunes le sont pour ceux et celles qui veulent reprendre leurs études et le Service National de la Jeunesse (SNJ) entre en compétence pour l’accompagnement des jeunes qui ont besoin d’aide avec la définition de leur projet professionnel. Après la fusion en 2017 du SNJ et de l’ALJ, dans le contexte de leur regroupement au sein de la nouvelle Maison de l’Orientation avec d’autres acteurs publics, chargés de l’orientation des jeunes, le paysage des acteurs de la Garantie pour la Jeunesse est désormais plus centralisé.

Il s’avère pourtant difficile de connaître le détail du fonctionnement du dispositif de la Garantie pour la Jeunesse et ainsi d’apprécier son succès et ses faiblesses. De même, le plan de mise en œuvre du dispositif en question prévoit des évaluations et améliorations continues des offres. Pourtant un tel bilan n’a pas encore été réalisé ou du moins pas rendu public.

Partant, nous voudrions poser les questions suivantes à Messieurs les Ministres :

1) Le dispositif de la Garantie pour la Jeunesse est-il continuellement évalué ? Dans l’affirmative, quels acteurs sont impliqués dans cette évaluation et quels en ont été les résultats ?

2) Les personnes concernées par la Garantie pour la Jeunesse – les jeunes de moins de 25 ans – sont-elles impliquées dans cette évaluation tel que recommandé par le Conseil Européen ?

3) Dans l’affirmative à la question 1), quels enseignements ont pu être tirés de ces évaluations et quelles adaptations ont été faites suite aux évaluations réalisées depuis 2014 ?

4) Parmi les acteurs œuvrant de différentes manières dans le cadre du dispositif de la Garantie pour la Jeunesse, quels en sont précisément les missions et comment se répartissent exactement les responsabilités entre ces acteurs quant à l’application du dispositif en question ?

5) Quelle est l’organigramme précis de la coordination du dispositif susmentionné et selon quelles règles/instructions se déroule la coopération entre les différents acteurs responsables de l’encadrement des jeunes bénéficiaires de la Garantie pour la Jeunesse ?

6) Messieurs les Ministres peuvent-ils nous fournir des informations sur l’effectif du personnel chargé de l’encadrement et du suivi des jeunes demandeurs d’emploi dans le cadre de la Garantie pour la Jeunesse pour chacun des acteurs impliqués (ADEM, SNJ, respectivement ALJ) ? Messieurs les Ministres estiment-ils que ces effectifs sont suffisants ou que l’encadrement pourrait être amélioré avec des effectifs plus importants ?

6) Etant donnée l’intégration de l’ALJ au sein du SNJ et leur centralisation à la maison de l’orientation, quels sont désormais le rôle et l’activité des bureaux régionaux de l’ALJ ? Comment s’organise la coopération entre ceux-ci et les services de l’ALJ au sein de la maison de l’orientation ?

7) Monsieur le Ministre de l’Education Nationale et de la Jeunesse peut-il nous informer sur les répercussions de la fusion de services des ALJ et SNJ en termes d’attribution de nouvelles responsabilités face à l’encadrement et l’accompagnement des jeunes ? Que reste-t-il des compétences attribuées auparavant à l’ALJ avant son intégration au sein du SNJ ?

8) Comme l’actuel accord de coalition prévoit une restructuration du Service national de la Jeunesse, dans l’objectif de créer un département entièrement dédié à l’éducation non-formelle, Monsieur le Ministre de l’Education nationale peut-il nous informer des éventuels changements qu’une telle restructuration implique pour les services actuellement hébergés à la Maison de l’Orientation ?

La Maison de l’Orientation regroupe différents services d’accompagnement et d’orientation des jeunes afin de faciliter leur coopération et de mieux coordonner ces services. Ces services œuvrant également dans l’intérêt du dispositif de la Garantie pour la Jeunesse, nous aimerions en savoir plus sur leur fonctionnement, leurs effectifs et les qualifications requises par le personnel. 

Partant, nous voudrions poser les questions suivantes à Monsieur le Ministre de l’Education nationale et de la Jeunesse :

9) Monsieur le Ministre peut-il nous dire s’il existe un cadre de référence précis pour la coordination de ces différents services ? 

10) Quel est le service qui gère en première instance la répartition des personnes demandeuses vers les services compétents ? 

11) Au sein de chaque service hébergé à la Maison de l’orientation, quelle est le nombre d’effectifs et quelles sont leurs qualifications requises ?

Il ressort du rapport annuel de 2017 du Ministère du Travail, de l’Emploi et de l’Economie sociale et solidaire que sur les 2.014 inscriptions à la Garantie pour la Jeunesse entre janvier et septembre 2017, 294 jeunes demandeurs d’emploi ont abandonné prématurément sans avoir obtenu une offre de qualité. De plus, parmi les 1.720 personnes inscrites n’ayant pas abandonné, 1.483 auraient reçu une offre de qualité, dont l’emploi représenterait 68%. Il en résulte qu’à peu près une jeune personne sur deux inscrites au dispositif se voit offrir un emploi avant ou après quatre mois d’inscription.

Partant, nous voudrions poser les questions suivantes à Messieurs les Ministres :

12) Combien de temps d’attente y a-t-il en moyenne entre l’inscription d’un jeune demandeur d’emploi à la Garantie pour la Jeunesse et son premier rendez-vous avec un conseiller ou une conseillère de l’ADEM ou d’un autre service compétent ? Les jeunes demandeurs d’emploi peuvent-ils bénéficier d’un encadrement de la part de l’ADEM ou d’un autre service durant cette période ?

13) Quels sont les modalités de sanction en cas de non-respect des obligations de suivi ? Combien de jeunes demandeurs d’emploi ont été concernés par une sanction en 2017 et comment le nombre de demandeurs d’emploi de moins de 25 ans a-t-il évolué depuis la mise en place de la Garantie pour la Jeunesse ?

14) Les jeunes ayant abandonné, peuvent-ils encore profiter d’un encadrement de la part des acteurs impliqués dans le dispositif ? Dans l’affirmative, quel acteur prend en charge cet encadrement et quel en sont les modalités ?

15) S’agissant d’une garantie pour la jeunesse, Messieurs les Ministres n’estiment-ils pas que l’exclusion de jeunes du dispositif constitue une contradiction, surtout parce que les jeunes de moins de 25 ans sont exclus du Revenu d’inclusion sociale ?

16) Comment vos Ministères respectifs définissent-ils une offre de qualité ? Un stage est-il considéré comme une offre de qualité ? Quelle est la part des contrats à durée indéterminée parmi les offres de qualité ?

17) Pouvez-vous nous indiquer le nombre de jeunes ayant accepté un stage ?

18) Messieurs les Ministres peuvent-ils nous indiquer à l’aide d’informations précises quels sont actuellement les secteurs d’emploi où les jeunes de moins de 25 ans, concernés par la Garantie pour la Jeunesse sont le plus représentés ?

19) Messieurs les Ministres disposent-ils d’informations concernant l’impact des contrats d’appui-emploi et d’initiation à l’emploi sur l’accès des jeunes de moins de 25 ans à un emploi stable ?

Les bulletins mensuels de l’ADEM sur l’évolution du chômage ne tiennent actuellement pas compte du chômage des jeunes de la tranche d’âge de 16 à 25 ans, mais ne fournissent que des informations sur le chômage des personnes âgées de moins de 30 ans. Ainsi, il n’est pas possible de connaître la durée d’inscription au chômage, ni la durée d’inactivité et le niveau de diplôme des jeunes de moins de 25 ans.

Partant, nous voudrions poser les questions suivantes à Monsieur le Ministre du Travail, de l’Emploi et de l’Economie sociale et solidaire.

20) Monsieur le Ministre n’est-il pas d’avis que la prise en compte dans les bulletins mensuels du nombre de chômeurs dans la tranche d’âge de 16 à 25 ans serait utile afin de pouvoir suivre plus régulièrement l’évolution du chômage des jeunes de moins de 25 ans ainsi que les effets de la Garantie pour la Jeunesse ?

 21) Monsieur le Ministre peut-il nous fournir les chiffres concernant l’évolution du chômage des jeunes de moins de 25 ans, depuis la mise en place de la Garantie pour la Jeunesse, de préférence sous forme d’un graphique ?

 22) Monsieur le Ministre peut-il également nous fournir des données sur l’évolution des durées d’inscription au chômage et d’inactivité ainsi que sur le niveau de diplôme des jeunes demandeurs d’emploi depuis la mise en place du dispositif ?

Veuillez croire, Monsieur le Président, à l’expression de nos sentiments respectueux,

David Wagner                                      Marc Baum

Député                                                Député

[1] https://eur-lex.europa.eu/legal-content/FR/TXT/PDF/?uri=CELEX:32013H0426(01)&from=EN

[2] Eurostat

[3] http://adem.public.lu/de/publications/adem/2018/rapport-annuel-succinct/Annual-report-2017.pdf

[4] https://gouvernement.lu/dam-assets/fr/actualites/communiques/2014/06-juin/26-garantie/plan.pdf

 

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