Le Brésil et nous

Zu Gast am Land

Je ne vais pas m’attarder sur les déclarations du président élu du Brésil, Jair “Messias” (sic!) Bolsonaro. Ses saillies racistes, mysogynes et homophobes ont été largement commentées et relayées et feraient passer Donald Trump pour un militant LGTB. Si les médias mainstream s’offusquent à juste titre de ses déclarations, ils se font, comme souvent, beaucoup plus discrets sur l’autre volet de la politique que Bolsonaro envisage.

Tout d’abord, ce dernier est clairement le candidat de l’oligarchie brésilienne, et par le truchement de son futur ministre de l’économie, Paulo Guedes, un “chicago boy”, de l’oligarchie internationale. Il faut toutefois savoir qu’à l’origine, il n’était pas leur “premier choix”. Ils lui auraient largement préféré des caciques de la politique brésilienne bourgeoise, installés depuis des lustres, à l’instar de Geraldo Alckmin ou d’Henrique Meirelles.

Mais ces derniers, incolores et empêtrés dans l’ancien “système”, ne rameutaient pas les foules. Bolsonaro, qui n’a jamais vraiment été pris au sérieux tout au long de sa carrière de député fédéral depuis 1991, n’est pas non plus le premier choix de l’armée brésilienne. Pour preuve, son vice-président (et son aile dure!), le général Hamilton Mourão, a déjà déclaré qu’il n’allait pas être un vice-président de témoignage. Et n’oublions pas qu’en cas de démission de Bolsonaro (ce qui n’est pas impossible), il lui succéderait.

Cette colonne ne me permet pas de m’éterniser sur les raisons de la déroute du PT et de son candidat, Fernando Haddad. Malgré des débuts prometteurs, comme le programme “Faim zéro” des débuts de la présidence Lula, qui a permi à des millions de Brésiliens de sortir de la misère crasse, le tournant “libéral” ne s’est pas trop fait attendre.

L’illusoire “alliance” avec les classes supérieures nationales s’est finalement – et comme si souvent dans l’histoire – retournée contre le PT: suite à la crise financière de 2008 qui a durement frappé le pays, ils se sont détourné du PT. Le problème, c’est que les classes populaires déçues ont fait de même, même si les raisons étaient diamétralement opposées.

Le Brésil n’échappe pas à la loi d’airain du capitalisme en crise: afin de se prémunir d’éventuelles révoltes sociales, les oligarchies de tous les pays mettent en place des roues de secours de natures et de rhétoriques différentes afin de préserver et de reconquérir leurs privilèges.

Et le Luxembourg dans tout cela?

Ce n’est un secret pour personne, le géant brésilien et le lutin luxembourgeois entretiennent des relations, notamment économiques, très étroites depuis 1911. S’y rajoute une communauté brésilienne établie au Luxembourg qui gagne en importance. Récemment, le bureau d’audit KPMG a publié une étude vantant les mérites de la coopération économique luxo-brésilienne (ArcelorMittal, Wurth SA, SES, etc…) ainsi que le rôle de la Place financière dans la gestion de fortunes et de fonds brésiliens. La question qui se pose est la suivante: jusqu’où l’argent n’a-t-il pas d’odeur?

Les acteurs économiques luxembourgeois et leurs gestionnaires de fortune de la “Place” réagiront-ils à l’élection d’un président dont le programme consiste à établir un régime autoritaire afin de prendre aux pauvres pour donner aux riches tout en déviant leur colère vers les Noirs, les Indigènes, les homosexuels, les transgenres et les femmes? Ou bien continueront-ils à apprécier les douceurs tropicales en compagnie de leur homologues enfin libérés de toutes sortes d'”entraves” au marché libre?

David Wagner, député de déi Lénk

 

 

 

 

 

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