Conférence de presse déi Lénk sur le débat autour de la Constitution

Dossier de presse

  1. Chronologie d’un débat voué à l’échec.

La Constitution actuelle date de 1868. Depuis elle a été modifiée à quarante reprises. De ces quarante modifications, pas moins de trente ont été faites depuis 1989. L’accord de coalition de 2004 avait prévu une refonte constitutionnelle. La commission des institutions a donc commencé à travailler. La proposition de révision constitutionnelle 6030 a été déposée en 2009. déi Lénk a accompagné ce processus de manière constructive mais a émis deux critiques fondamentales :

  • La proposition 6030 est un simple toilettage, elle manque ambition et n’est donc pas à la hauteur des défis du XXIe siècle.
  • Le texte a été rédigé à huis clos sans participation citoyenne.

En raison du manque d’ambition, déi Lénk a commencé à plancher sur une Constitution alternative en consultant des experts sur la question. Cette proposition alternative a été déposée à la Chambre en 2016, où elle prend la poussière depuis. En ce qui concerne l’absence de participation citoyenne, de légères ouvertures avaient été concédées :

  • en 2015/2016, les citoyen.ne.s ont pu faire leurs propositions aux député.e.s. Ces propositions n’ont pas été vraiment considérées.
  • l’université avait réuni un panel de 60 personnes représentatives pour discuter, le temps d’un weekend, du texte de révision. Cette démarche n’a pas eu le moindre impact.

En 2018, le rapport de la proposition 6030, qui constitue la dernière étape avant le vote, a été adopté par tous les partis. Seul déi Lénk s’est abstenu. Tous les partis avaient promis à l’époque la tenue d’un référendum. En 2019, le CSV a procédé à un revirement spectaculaire : plus de référendum et le morcellement de la révision en quatre parties. Avec ces 21 sièges, le CSV peut bloquer la révision, la majorité a donc dû accepter ce marchandage. En automne 2021, la première partie de la révision, qui porte sur la justice, a été adoptée par les député.e.s du CSV et de la majorité. déi Lénk s’est encore abstenu.

La rupture de la promesse d’un référendum a été instrumentalisée par l’ADR pour lancer une vaste campagne en faveur d’une consultation. La pétition 2007, qui a recueilli environ 20.000 signatures, en a fait partie. Tout comme l’initiative citoyenne qui consiste à rassembler les 25.000 signatures nécessaires dans les communes. déi Lénk est toujours favorable à un référendum, mais il ne soutient ni la pétition, ni l’initiative citoyenne. La pétition est clairement une initiative de l’ADR, car elle reprend les arguments délirants du parti de Fernand Kartheiser et joue ainsi sur les peurs des citoyen.ne.s: obligation vaccinale, vision du monde ultraconservatrice, xénophobie latente, royalisme moyenâgeux et individualisme néolibéral. L’ADR s’inspire clairement des stratégies du suppôt de l’extrême droite Steve Bannon : propagation de messages mensongers et cultivation de peurs infondées. Quant à l’initiative référendaire, elle n’aboutit qu’à un questionnement binaire peu satisfaisant et surtout illisible.

L’ADR, avec une démagogie plus effrontée que jamais, essaie de capitaliser sur cette situation. En réalité, le parti ne s’est jamais véritablement intéressé à la question constitutionnelle, il était même plutôt favorable à la proposition de révision. Ce n’est qu’avec l’arrivée de Fernand Kartheiser à la Commission des institutions que la position de l’ADR s’est abruptement droitisée. La position du CSV est tout aussi incohérente. Il a voté pour le rapport de la proposition 6030 et il a promis un référendum avant de tout chambouler pour des raisons qui demeurent parfaitement obscures. Le CSV n’a pas de ligne claire dans ce débat et il est le principal responsable pour le bourbier dans lequel s’est enlisé le débat. DP, LSAP et déi Gréng avaient également promis un référendum. Ils peinent désormais à expliquer pourquoi une telle consultation est devenue caduque. Les Pirates ont soutenu la pétition de leur ancien partenaire de groupe parlementaire, ce qui en dit également long.

Le débat sur la Constitution est la victime d’un spectacle politico-politicien indigne. Les quatre grands partis ont chacun rompu leur promesse d’un référendum, ce qui entraîne une perte de confiance en la politique et en les institutions démocratiques. Seul déi Lénk est toujours resté fidèle à ses idées :

  • Sur le fond : rédiger une Constitution à la hauteur des enjeux de notre société.
  • Sur la forme : élaborer le texte en intégrant véritablement les citoyen.ne.s et, désormais, des propositions concrètes pour sortir  de cette crise politique et institutionnelle.
  • La Constitution du XXIe siècle

La Constitution alternative de déi Lénk qui a été présentée une première fois aux médias en avril 2015 et qui a été déposée à la Chambre des députés en 2016, se donne comme objectifs de protéger les droits acquis et de créer de nouveaux droits. Elle se veut donc à la fois défensive et offensive. Cette logique est déclinée en quatre principaux piliers. Le premier consiste en la nécessité d’une Constitution moderne qui tienne compte des réalités du pays. Un État moderne, tel que déi Lénk se l’imagine et tel que notre Constitution le définit, ne peut, bien entendu, qu’être une république laïque et sociale fondée sur le pouvoir des citoyen.ne.s. Notre définition de l’État protège à la fois les citoyen.ne.s contre les abus de l’État et la démocratie contre les assauts incessants des pouvoirs économiques.

Le deuxième pilier consiste à donner davantage de droits fondamentaux et de renforcer activement ceux qui existent en donnant à l’État la mission de combattre les forces qui pourraient porter atteinte à ces droits. Il va sans dire que notre Constitution garantit le droit au travail et au logement.

L’environnement trouve aussi une place de choix dans notre alternative qui érige des barrières efficaces contre la destruction de la nature et des ressources. De plus, elle fixe l’obligation de réduire notre empreinte carbone.

Le troisième pilier est la justice sociale. Pour déi Lénk, l’extension des droits sociaux a toujours fait partie de ses priorités et cela se ressent dans notre Constitution qui garantit une meilleure protection des salariés. L’État se voit attribuer la mission de lutter contre les inégalités sociales.

Le dernier pilier enfin est celui de la démocratie. Il ressort de l’article premier de notre Constitution que la république du Luxembourg est fondée sur le pouvoir des citoyen.ne.s. Or, une démocratie ne vit que grâce à ses citoyen.ne.s. Il est dès lors évident d’agrandir le contingent de votants. Ainsi, notre texte accorde le droit de vote aux étrangers qui résident au Luxembourg depuis 5 ans et il fixe l’âge politique à 16 ans. Enfin, notre proposition alternative prévoit un mécanisme qui permet à un nombre défini de citoyen.ne.s de rédiger des propositions de loi. La participation n’est donc pas un vain mot.

Une modernisation des institutions est indispensable. Le Conseil d’État sera réformé en profondeur. Ses membres, parmi lesquels des représentants de la société civile, seront nommés par la Chambre. Enfin, les mandats ministériels seront limités et les membres du gouvernement devront respecter un code de déontologie digne de ce nom.

La Constitution de déi Lénk vise donc à renforcer les citoyen.ne.s, à donner à l’État un rôle actif dans la défense des droits et à renforcer la démocratie en misant sur une participation réelle des citoyen.ne.s.

  • Comment sortir du bourbier : le préférendum.

Une définition classique de la démocratie dit que les lois doivent être rédigées par celles et ceux à qui elles s’appliquent. Ceci est d’autant plus vrai lorsqu’il s’agit de la constitution, de la loi fondamentale donc. Or, lorsque la Chambre décide de faire adopter sa révision constitutionnelle grâce à une majorité parlementaire, même s’il s’agit d’une majorité de deux tiers, elle ne tient pas compte de cette définition, car à aucun moment les citoyen.ne.s n’ont véritablement participé à l’élaboration du texte.

Un référendum qui ne permettrait que de voter « oui » ou « non » n’est pas la panacée pour sortir de ce bourbier. Le résultat ne serait que difficilement lisible. S’y ajoute que l’actuelle révision n’apporte que de très légères modifications. On ne peut donc pas parler de modernisation. On n’assiste pas à une redéfinition des objectifs de l’État, à une refonte de nos institutions démocratiques ou encore à un renforcement de droits fondamentaux.

Actuellement, seul le chapitre concernant la Justice a été soumis au premier vote constitutionnel. Ce morcèlement factice d’un texte qui doit être d’une cohérence sans faille est le résultat d’un marchandage politico-politicien entre le CSV et les partis de la majorité gouvernementale. A nos yeux, il faudrait commencer par mettre fin à ce saucissonnage indigne et traiter la révision comme un ensemble afin de permettre une meilleure lisibilité du texte. Ensuite, le projet de révision devrait faire l’objet d’un vaste débat public digne de ce nom. Enfin, ces discussions devraient se clore pour un référendum qui poserait trois questions :

  1. Je suis en faveur de l’actuelle Constitution
  2. Je suis en faveur de la nouvelle version
  3. Je ne suis satisfait ni par l’actuelle Constitution ni par sa révision, je veux que les travaux de révision se poursuivent sur un certain nombre de points.

Les citoyens pourraient ensuite préciser ces points, ce qui leur permettrait d’exprimer leurs préférences. En France, ce genre de référendum est appelé « préférendum ». En Islande et en Irlande, de telles consultations ont déjà eu lieu. On pourrait d’ailleurs s’imaginer différentes modalités pour le mettre en place. Dans une tribune parue dans Le Monde du 22 octobre 2021, l’historien David van Reybrouck avait résumé ainsi les avantages du préférendum : « Le préférendum (…) respecte le principe du suffrage universel, valorise le référendum et renforce les réflexions citoyennes. »

  Au lieu de laisser l’ADR phagocyter le débat avec ses mensonges, le préférendum serait un outil pour revivifier la démocratie et pour renforcer la cofinance des citoyen.ne.s en une démocratie qu’elles/ils se seraient vraiment appropriée.

déi Lénk

logo European Left logo GUE/NGL logo Transform! Europe