Question parlementaire sur le chômage partiel pendant l’état de crise.

Monsieur le Président,

Le Code du Travail luxembourgeois prévoit dans son article L.511[1] des mesures destinées à prévenir des licenciements conjoncturels. Ce dispositif peut être déclenché si une ou plusieurs branches de l’économie sont confrontées à un recul considérable et temporaire de l’activité dû principalement à des causes conjoncturelles et offre des subventions publiques à la faveur des branches et aux entreprises concernées en échange d’un engagement de leur part de maintenir les contrats de travail de leur personnel. Le Code du Travail définit à cet effet une procédure détaillée pour décider de l’octroi de subventions publiques aux entreprises qui en font la demande.

L’octroi des subventions publiques précitées peut être étendu à des entreprises qui connaissent des difficultés structurelles (art. L. 512-7) ou en cas de force majeure (art L. 511-4).

Depuis mars 2020 et le déclenchement de la pandémie de la Covid19 en Europe et au Luxembourg le dispositif a connu plusieurs adaptations. Ces dernières visaient dans une première phase le maintien dans l’emploi du personnel des entreprises concernées par un arrêt complet de leurs activités et, par conséquent, un allègement et une accélération de la procédure de demande de subventions. Ainsi, les demandes des entreprises saisies en ligne qui n’ont plus pu exercer leurs activités suite aux décisions gouvernementales de mars 2020 ont été directement traitées par l’ADEM sans que le Comité de conjoncture n’ait dû émettre un avis. Les demandes des autres entreprises ont continué d’être traitées qu’après avis du Comité de conjoncture. [2] Cet allègement de la procédure à l’égard des entreprises touchées par la situation sanitaire a permis de traiter un nombre important de demandes endéans quelques jours et de libérer rapidement les fonds nécessaires pour assurer le maintien dans l’emploi de dizaines de milliers de salariés pendant la période de confinement entre la fin du mois de mars et juin 2020.

Pourtant, ce réaménagement de la procédure a également augmenté le risque de pratiques potentiellement illicites. Dans ce contexte, deux types de pratiques pourraient être envisagées : Une première concerne le maintien en activité soit à temps partiel, soit à temps plein, d’employés en chômage partiel. Ce cas de figure pourrait se présenter dans des entreprises ayant dans un premier temps cessé leurs activités pour ensuite décider d’en relancer une partie mais selon des modalités adaptées à la situation (p.ex. avec livraison à domicile d’achats effectués en ligne). Le deuxième cas de figure concerne la soumission par des entreprises de demandes de chômage partiel incomplètes, fausses ou illicites. Pour ces deux cas de figure se pose la question des moyens de contrôle à disposition des agences publiques en charge de la supervision du dispositif.

Partant je voudrais poser les questions suivantes à Monsieur le Ministre du Travail et de l’Emploi :

  1. Combien d’entreprises ont obtenu des subventions destinées à l’indemnisation des chômeurs partiels pendant la durée de l’état de crise au printemps 2020 ? Combien de salariés ont été concernés pendant cette période ? Quel est le montant total versé aux entreprises pendant cette période ?
  2. Combien d’entreprises ont obtenu les subventions précitées qui n’ont en principe pas dû arrêter leurs activités pendant la période de l’état de crise et combien de salariés en ont été concernés ?
  3. Combien de demandes ont dû être traitées par les autorités compétentes pendant cette période sachant que la mise au chômage partiel de chaque salarié individuel nécessite une demande de subvention et que chaque demande a dû être renouvelée pour chaque mois ?
  4. Quel(s) service(s) de l’ADEM a/ont été chargé(s) du traitement des demandes des entreprises qui n’ont plus pu exercer leurs activités suite aux décisions gouvernementales de mars 2020 ? Combien de fonctionnaires respectivement d’employés étaient en charge du traitement de ces demandes ?
  5. Comment le traitement et le contrôle des demandes des entreprises a pu être assuré sachant que l’ADEM a versé des subventions dans des délais extrêmement courts afin d’éviter des impasses financières au niveau des entreprises ? Un contrôle a minima des demandes a-t-il pu être assuré en amont du versement des subventions ou a-t-il eu lieu a posteriori ?
  6. Les subventions accordées aux entreprises qui n’ont pas directement été concernées par les décisions gouvernementales de mars 2020 et dont les demandes ont continué d’être traitées par le Comité de conjoncture, ont-elles été vérifiées et versées dans les mêmes délais et selon les mêmes modalités que celles accordées aux entreprises confrontées à un arrêt de leurs activités sous l’effet du confinement ? Dans la négative, comment la procédure du Comité de conjoncture différait-elle de celle de l’ADEM ?
  7. Quel est le taux des demandes de la part d’entreprises pour des subventions dans le cadre du dispositif précité qui ont été rejetées avant tout versement d’aides par l’ADEM ? Quels ont été les motifs pour ces rejets éventuels ?
  8. Le contrôle a posteriori des demandes des entreprises par l’ADEM conformément à l’article L.511-13 du Code du Travail est-il toujours en cours ou a-t-il déjà été clôturé ?
  9. Pour combien de cas l’ADEM a-t-elle pu constater que les subventions ont été accordées sur la base de déclarations fausses (Art. L. 511-14) ?
  10. Si de tels cas ont pu être constatés par l’ADEM quel est le montant total des subventions qui a dû être restitué jusqu’à ce jour ? Combien d’entreprises ont été contraintes à restituer des subventions?
  11. Des sanctions ont-elles été prononcées à l’égard d’entreprises pour lesquelles des manquements ont été constatés ou qui ont fait des déclarations fausses pour la période d’avril à juin 2020? Dans l’affirmative, combien de sanctions ont-elles été prononcées et pour quel montant au total ?
  12. Les autorités compétentes ont-elles été en mesure de contrôler pendant l’état de crise si des salariés mis au chômage partiel par leurs employeurs n’ont pas été sollicités pour continuer à travailler que ce soit à temps plein ou à temps partiel ? Dans l’affirmative et dans le cas où des manquements aux règles ont été constatés, quelles ont-été les sanctions prononcées dans ces cas de figure ?
  13. Dans la négative à la question 11) les autorités compétentes disposent-elles de moyens pour réaliser des contrôles a posteriori pour ces cas de figure ?

Veuillez agréer, Monsieur le Président, l’expression de mes sentiments distingués,


Marc Baum

Député


[1] http://data.legilux.public.lu/file/eli-etat-leg-code-travail-20200828-fr-pdf.pdf

[2] https://gouvernement.lu/fr/actualites/toutes_actualites/communiques/2020/03-mars/27-chomage-partiel.html

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