Question parlementaire: Frais de photocopies dans l’enseignement secondaire.

Monsieur le Président,

Conformément à l’article 83 du Règlement de la Chambre des Députés, je vous prie de bien vouloir transmettre la question parlementaire suivante à Monsieur le Ministre de l’Education nationale.

Il m’est parvenu que les directions de certains établissements de l’enseignement secondaire auraient pour pratique d’enjoindre aux membres du corps enseignant de faire payer, en espèces, à leurs élèves les feuilles polycopiées qui leur sont distribuées à des fins scolaires. Etant donné que ces feuilles ont été photocopiées par la machine de l’établissement, les enseignants doivent par la suite, depuis leur compte en banque personnel, virer l’argent récolté auprès des élèves vers le compte de l’établissement scolaire.

 

Partant, je voudrais poser à Monsieur le Ministre les questions suivantes :

 

  • (-) Monsieur le Ministre est-il au courant de cette pratique ?
  • (-) Le cas échéant, Monsieur le Ministre peut-il me communiquer la liste des établissements scolaires s’adonnant à cette pratique ?
  • (-) Monsieur le Ministre estime-t-il qu’il soit normal qu’un enseignant demande à ses élèves, et a fortiori à leurs parents, d’engager des frais pour ce qui est à considérer comme du matériel scolaire et de surcroît par une méthode aussi informelle et peu professionnelle ?
  • (-) D’après mes informations, la tâche de centraliser l’argent récolté par les enseignants reviendrait finalement au régent de la classe, qui doit ainsi s’exécuter de cette tâche comptable. Une telle tâche fait-elle partie de ses attributions ?
  • (-) Monsieur le Ministre comprend-il la gêne occasionnée par cette situation aussi bien auprès de l’enseignant qu’auprès des élèves ?
  • (-) Se pose également la question de la base légale de cette pratique. A ma connaissance, la seule base légale à laquelle se réfère le ou les établissement(s) en question serait un « Règlement ministériel du 13 juillet 2007 portant fixation des conditions et modalités de perception de recettes par les services de l’Etat à gestion séparée dépendant du Ministère de l’Education nationale et de la Formation professionnelle ». Or, à ma connaissance et à ce jour, ce règlement ministériel semble ne pas avoir été publié. Monsieur le Ministre peut-il m’indiquer si ce règlement ministériel a effectivement été publié et, le cas échéant, peut-il m’indiquer la date de publication dudit règlement ?
  • (-) Cette pratique pourrait-elle se baser sur la loi du 8 juin 1999, notamment son article 74, qui prévoit toutefois la publication d’un Règlement grand-ducal sur avis du Conseil d’Etat permettant de déroger à l’universalité des règles de comptabilité, dont je n’ai pour ma part toutefois pas connaissance ? Monsieur le Ministre pourrait-il m’indiquer si un tel Règlement grand-ducal aurait été adopté et publié ?
  • (-) A l’occasion d’une conférence de presse, Monsieur le Ministre, déclara, à juste titre, que l’introduction de la gratuité des manuels scolaires mettrait enfin le Luxembourg en conformité avec l’article 23 de la Constitution consacrant la gratuité de l’enseignement. D’une manière générale, Monsieur le Ministre estime-t-il que cette pratique soit conforme au principe de l’article 23 de la Constitution consacrant la gratuité de l’enseignement ?
  • (-) Dans l’hypothèse d’une régularité tant légale que constitutionnelle de cette pratique, Monsieur le Ministre estime-t-il néanmoins qu’il serait approprié de mettre un terme à cette pratique et d’assurer que les feuilles photocopiées destinées aux cours soient distribuées gratuitement aux élèves ?

 

Il m’est également parvenu que certains enseignants refuseraient, pour des raisons déontologiques, de récolter de l’argent auprès des élèves et prendraient ainsi personnellement en charge les feuilles photocopiées. Par conséquent, ces enseignants ne se voient pas dans l’obligation de virer à l’établissement des sommes qu’ils n’ont jamais récoltées, ce qui aurait pour conséquence qu’ils sont suspectés par la direction, d’une part de garder l’argent récolté et d’autres part de contrevenir à l’obligation légale d’un fonctionnaire de se « conformer (…) aux ordres de service de ses supérieurs » (article 9 du chapitre 5 de la loi du 16 avril 1979 fixant le statut général des fonctionnaires de l’Etat). Or, cette disposition est susceptible d’être contredite par le point 4 de l’article 9 relatif aux devoirs des fonctionnaires de la loi idoine, stipulant que le fonctionnaire peut se soustraire à un ordre s’il estime que « (…) l’ordre reçu est entaché d’irrégularité, ou que son exécution peut entraîner des inconvénients graves (…) » ? Il en résulte une situation kafkaïenne où un enseignant distribuant sur ses fonds propres du matériel scolaire afin de préserver des élèves et leurs familles de débourser de l’argent pour assurer leur droit à l’éducation, se voit réprimander par sa direction.

 

Ma question est la suivante :

 

  • Monsieur le Ministre estime-t-il que l’enseignant refusant de collecter cet argent auprès des élèves pour des raisons plus que compréhensibles, peut-il être mis en demeure par sa direction ?
  • Finalement, dans l’hypothèse où cette pratique est entachée d’irrégularité, enjoindrez-vous aux établissements de rembourser l’intégralité des élèves qui auront été ponctionnés pécuniairement de manière injustifiée ?

 

Avec mes salutations respectueuses,

David Wagner

Député

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