Le 26 mars 1871, des élections municipales s’accomplissaient dans la légalité, les maires y ayant consenti. Le Conseil communal, élu par environ 229 000 votants sur environ 485 000 (soit à peu près 50 % d’abstention), était mis en place à l’Hôtel de Ville le 28 mars sous le nom de Commune de Paris et recevait les pouvoirs du Comité central.
Pendant le court laps de temps que survécut la Commune, les communards avaient élaboré un catalogue de mesures démocratiques et sociales qui restent ou redeviennent d’une brûlante actualité dans le monde où nous vivons :
Une démocratie qui permettait au peuple d’être entendu et de conserver sa pleine souveraineté
– Reconnaissance de la citoyenneté pour les étrangers
– Mesures pour l’émancipation des femmes
– Instruction laïque, obligatoire et gratuite
– Réquisition des logements vacants pour les sans-domiciles
et moratoire sur les loyers
– Réquisition des entreprises abandonnées
– Protection sociale et contrôle salarié
– Égalité des salaires des femmes et des hommes
– Réduction de la journée de travail
– Gestion des ateliers par des coopératives ouvrières
– Interdiction du travail de nuit
– Justice accessible à tous
– Séparation de l’Eglise et de l’Etat
– Liberté de la presse
– Droit du divorce
– Reconnaissance de l’union libre
Une grave erreur des communards consiste dans le fait de ne pas avoir pris le contrôle de la banque de France.
Erreur fatale qui contribuait largement à l’échec de la Commune.
Une question se pose : quelles sont les raisons qui l’ont poussée à la commettre.
On évoque 2 membres de la Commission des Finances, Charles Beslay qui devient le délégué de la Commune auprès de la Banque de France et François Jourde, comptable, nommé délégué aux finances.
Ce ne sont certes pas les seuls « coupable », s’il en faut :
La grande majorité des membres de la Commune avaient la même perception, la même approche du problème de la Banque de France. Ils étaient, déjà en 1871, victimes de deux mythes qu’il convient de dénoncer.
1) Le premier est que la banque – et plus généralement la finance – appartient au domaine du sacré.
2) Le second, qui en découle, est que les mécanismes financiers sont trop compliqués pour être compris par les simples citoyens, voire par les responsables politiques, et qu’ils doivent de ce fait être réservés à des spécialistes ou même à des experts.
On peut se demander si la sacralisation de la finance n’est pas, aujourd’hui encore, l’un des moyens de cette répression des idées et des projets progressistes et l’une des causes de cette absence de solution.
Le gouverneur et les régents ne refusaient pas l’argent demandé par les communards, ils en retardaient le plus possible le versement, ou bien le fractionnaient. Une situation qui ressemble étrangement à ce que nous vivons aujourd’hui avec la Grèce.
L’Union Européenne, ne refuse pas l’argent dont la Grèce a absolument besoin pour combler la dette héritée des gouvernements précédents mais le versement est subordonné à des mesures antisociales. Cette dette pourrait en parti s’avérer odieuse ou illégitime. Le Parlement grec ayant commandé une étude auprès du Comité pour l’annulation de la dette du tiers monde (CADTM) qui sous la présidence d’Éric Toussaint passera au peigne fin l’accumulation de la dette.
L’Union Européenne exige des concessions, qui servent les intérêts des finances et des transnationales et qu’on appelle réformes, de la part du gouvernement de coalition formé après les élections démocratiques du 25 janvier 2015 entre le parti SYRIZA, (une coalition entre des mouvements de gauche et écologiques) et le parti de droite « Grecs indépendants » (ANEL).
Les 2 partis avaient décroché 149 sièges pour SYRIZA et 13 pour ANEL disposant donc d’une légitimation de la part des électeurs de former un gouvernement et devant répondre aux attentes des électeurs qui ont un légitime espoir de voir les promesses de la campagne électorale se réaliser.
Le programme gouvernemental est à chaque fois rejeté par les instances européennes ou internationales et une plus grande austérité est mise en jeu pour recevoir l’argent nécessaire. Le gouvernement Allemand est en tête pour refuser toute concession à la Grèce, cette Allemagne qui avait jeté une couverture brune sur l’Europe au 20e siècle et qui refuse de payer les dommages de guerre qu’elle a causée en Grèce.
Tout comme la Commune fut réprimée par l’ordre régnant, la Grèce doit céder au dictat du néolibéralisme. Des réformes visant à améliorer le sort des êtres humains, qui ont connu la plus grande misère ces dernières années, ne sont pas tolérées.
Le gouvernement vise prioritairement l’apaisement de la crise humanitaire.
– Fourniture de l’électricité nécessaire gratuite, subvention alimentaire et garantie du logement pour environ 30.000 familles.
– Gratuité des transports publics pour les personnes sous le seuil de pauvreté.
– Elévation graduelle du salaire minimum.
– Réforme de la législation sur les conventions collectives.
– Réintégration de la population à la sécurité sociale.
– Accessibilité des soins médicaux et pharmaceutiques à l’ensemble des habitants.
– Suspension de la réduction des retraites.
– Réembauche des femmes de charge du ministère des finances qui avaient été licenciées au profit d’une firme de nettoyage privée.
Elles ont été réintégrées ce mercredi (6/05/2015)
Ces mesures d’urgences pour amortir les souffrances des plus démunis sont refusées par les zélateurs européens et internationaux au service de la finance.
D’autres mesures nécessaires pour stabiliser le pays sont également réfutées :
– une relance de l’économie réelle est envisagée au détriment de la financiarisation du capital.
– -Le rôle de la Banque de Grèce doit être révisé avec des mesures de protection contre les produits et services douteux
– Une Banque Nationale de Développement doit être créée
– Le réseau des banques coopératives et régionales doit être réformé et élargi.
Les banques doivent trouver leur rôle au service de l’économie et des hommes, la situation inverse que nous connaissons actuellement pervertit tout simplement les sociétés dans laquelle nous vivions.
– Le gouvernement grec veut remédier au système fiscal qui exonérait le capital, favorisait l’évasion fiscale et faisait payer les travailleurs.
– Il a établi un programme de préservation de l’environnement naturel et des monuments culturels.
Toutes ces mesures rappellent John Keynes dont les théories économiques étaient en vogue pendant l’époque qu’on appelle les 30 glorieuses et qui s’étendait après la 2e guerre mondiale jusqu’à l’apogée du néolibéralisme qui sonna le glas d’une répartition plus juste des richesses.
Maintenant le fait de vouloir réinstaller un régime économique qu’on appelait à cette époque économie de marché à caractère social donne le frisson aux élites européennes et le gouvernement SYRIZA est qualifié d’extrême gauche.
Le message est clair, les peuples en Europe ne doivent pas retrouver espoir,
« There is no alternative », le slogan émis par Marguerite Thatcher en Angleterre et repris par Ronald Reagan aux Etats-Unis et répété inlassablement par les adeptes du néolibéralisme ne doit en aucun cas être mis en doute. La perspective d’une meilleure vie, une vie protégée par un droit de travail efficace et une sécurité sociale universelle pourrait avoir un effet néfaste sur les profits de la finance et des multinationales.
Une Grèce sociale pourrait avoir un effet de domino, d’autre pays pourraient suivre, tout brin d’espoir doit être étouffé à la base.
Alors soutenons la Grèce
Vite créons beaucoup de Grèces afin que cette lueur qui commence à briller au bout du tunnel s’agrandisse pour le bonheur et le bien-être des populations en Europe et dans le monde entier.
La démocratie, les standards sociaux et sanitaires élevés, le droit de travail à la hauteur, la réduction substantielle de la durée du travail, la protection de la nature et la réparation des dégâts doivent être rétablis et élargis en Europe et dans le monde entier.