Le 30 janvier 1999 s’est réuni au Casino Syndical à Luxembourg-Bonnevoie le congrès constitutif de déi Lénk/la Gauche. Ce congrès a été l’aboutissement d’un processus politique qui a fait prendre conscience à beaucoup de militant-e-s de gauche de la nécessité de dépasser les clivages antérieurs et de rassembler les forces politiques se situant à gauche de la social-démocratie et refusant de subordonner leur action à une logique gestionnaire. Cette prise de conscience avait été facilitée par le ralliement de la social-démocratie européenne aux idées néolibérales du «New Labour» et de la «Neue Mitte».
déi Lénk/la Gauche a réussi à rassembler les forces de gauche luxembourgeoises auparavant divisées: Parti Communiste Luxembourgeois, Nouvelle Gauche, Parti Socialiste Révolutionnaire, dissident-e-s des JSL et du POSL, syndicalistes du secteur public et un certain nombre de femmes et d’hommes de gauche qui étaient jusqu’alors inorganisé-e-s.
Les adhésions à déi Lénk/la Gauche se font sur une base individuelle. Aucune organisation existante n’a cependant été obligée à se dissoudre. Les statuts du mouvement unitaire ne prévoient pas d’adhésions collectives. Ainsi les membres peuvent décider de manière souveraine et démocratique aux congrès annuels sur les choix politiques du mouvement unitaire. Les élu-e-s sont seulement responsables devant les membres de déi Lénk/la Gauche.
déi Lénk/la Gauche a présenté des listes complètes aux élections législatives et européennes du 13 juin 1999. Aux élections législatives le mouvement unitaire a obtenu 3,3% des votes et un siège à la Chambre des Députés. Compte tenu des pertes des socialistes un nouveau gouvernement a été constitué sur la base d’une coalition entre chrétiens-sociaux et libéraux.
Les élections communales du 10 octobre 1999 ont confirmé le succès de déi Lénk/la Gauche qui fit son entrée au conseil communal de la capitale et conquit deux sièges à Esch/Alzette, la deuxième ville du pays, ainsi que divers sièges dans d’autres communes industrielles. Les gains ont été de 20% en moyenne par rapport aux élections de juin, ce qui permet d’estimer l’influence du mouvement unitaire après les élections communales à 4% de l’électorat.
A la suite de querelles politiques empêchant la constitution d’une majorité au conseil communal, de nouvelles élections communales ont eu lieu à Esch/Alzette le 30 avril 2000, qui ont apporté des gains en voix à tous les partis de gauche. déi Lénk/la Gauche a obtenu 12,78% des voix (7,87% en juin 99, 10,78% en octobre 99), confirmant ainsi son ascension. En ce qui concerne les résultats individuels, André Hoffmann, chef de file de la liste de déi Lénk/la Gauche, arrivait en tête devant Lydia Mutsch (tête de liste socialiste) avec 3.140 contre 2.851 voix. A la suite de ces élections a été constitué à Esch/Alzette un conseil échevinal prenant appui sur une majorité de gauche plurielle (socialistes, verts et déi Lénk/la Gauche).
Le travail des élu-e-s de déi Lénk/la Gauche a permis une présence continue au niveau des institutions et des médias. Le nouveau mouvement unitaire n’a jamais eu pour but de devenir un parti limitant son attention aux élections et à la participation au pouvoir. Il a toujours appelé ses membres à s’investir dans les syndicats et les mouvements sociaux et à impulser des initiatives extraparlementaires.
Depuis la guerre du Kosovo la question des réfugiés est devenue d’une actualité brûlante. déi Lénk/la Gauche a condamné les bombardements de l’OTAN contre la Yougoslavie, mais elle s’est opposée avec autant de vigueur à l’expulsion brutale de ceux qui avaient été appelés à déserter et à fuir. Les manifestations contre les expulsions ont conduit plusieurs fois à des heurts avec la police, notamment devant l’Hôtel Ibis où avaient été enfermées les personnes prévues pour l’expulsion et lors de la tentative d’empêcher un avion de décoller.
Une autre conséquence de cette guerre a été la prise de conscience du tournant militariste pris par le gouvernement luxembourgeois. Refusant d’entrer dans le jeu d’une prétendue défense européenne qui équilibrerait la puissance militaire des États-Unis, déi Lénk/la Gauche a dénoncé l’augmentation du budget militaire, la participation à des actions dites pacifiques «out of area», en Bosnie et en Afghanistan notamment, et l’utilisation des écoles publiques pour des campagnes de recrutement.
Dès que les menaces d’une guerre contre l’Irak se sont précisées en automne 2002, un mouvement de la paix s’est reconstitué autour de trois organisations de création récente : la Lëtzebuerger Friddensinitiativ, la Jugend fir Fridden a Gerechtegkeet et le Comité pour une Paix Juste au Proche Orient. Dans ces trois organisations des militants de déi Lénk/la Gauche ont joué un rôle déterminant, sans pour autant que l’autonomie de ces organisations ait jamais été mise en question. En février 2003, les trois organisations ont réussi à réunir plus de 60 organisations pour un appel à manifester qui a été suivi par près de 15.000 personnes, ce qui ne s’est jamais vu à Luxembourg. Ce raz de marée populaire a obligé le gouvernement Juncker à se démarquer de la politique des États-Unis et a été suivi en mars d’un mouvement lycéen qui a mobilisé l’ensemble des élèves du pays.
En mars-avril 2003 le tournant répressif est devenu de plus en plus visible, aussi bien au niveau des dispositifs législatifs anti-terroristes qu’au niveau de l’action policière lors des manifestations de lycéens, de sidérurgistes et des rafles de prétendus islamistes. Contrairement aux centrales syndicales luxembourgeoises, déi Lénk/la Gauche s’est solidarisée avec les sidérurgistes belges et européens s’opposant aux fermetures de sites. Elle a témoigné devant l’opinion publique des brutalités policières.
A l’approche des élections législatives de juin 2004 les relations avec le parti communiste se sont détériorées. Le PCL reprochait au mouvement unitaire d’occuper tous les terrains et de se transformer progressivement en parti politique et craignait d’être marginalisé lors de la composition des listes électorales. Le 3e Congrès de déi Lénk/la Gauche a rejeté toute tentative de remettre en cause le mouvement unitaire et de lui substituer une simple coalition d’appareils politiques.
Sur le plan international, déi Lénk/la Gauche participe activement aux regroupements destinés à fonder un parti européen ouvert à tous les courants de la gauche transformatrice et anticapitaliste, consciente du fait que le chemin choisi au plan national correspond aux options centrales de la grande majorité des partis politiques se réclamant des mêmes traditions.
déi Lénk/la Gauche se caractérise par des structures horizontales qui se trouvent à l’opposé de ce qui était la règle dans le mouvement ouvrier. Pour les mandats électifs elle a opté pour le principe de rotation qui est destiné à renforcer le travail d’équipe et à assurer la relève permanente. Le mouvement unitaire est dirigé par des organes de coordination, au sein desquels les fonctions de président et de secrétaire sont assurées à tour de rôle. Grâce à sa présence au Parlement il dispose de bureaux et d’un secrétariat administratif embryonnaire. Depuis juin 2003 le mouvement unitaire s’est doté d’un courrier électronique paraissant chaque semaine sous le nom de «Goosch.lu».
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