Monsieur le Président,
Conformément à l’article 79 du Règlement de la Chambre des Députés, je vous prie de bien vouloir transmettre à Monsieur le Ministre de la Justice la question parlementaire suivante:
Selon la réponse de MM. les Ministres de la Sécurité sociale et des Affaires étrangères à ma question parlementaire (No. 847), « suite aux informations parvenues au FDC (Fonds de compensation commun au régime général de pension), il a été convenu d’un commun accord avec le président dudit fonds d’entamer sans délai les procédures pour se défaire de ces actions. » ll y a donc aveu que le Fonds de compensation possédait des « actions de cinq des sept sociétés incriminées dans la question parlementaire, à savoir : Lockheed Martin, L-3 Communications, Textton, Hanwha et Singapore Technologies Engineering » et que ces sociétés sont susceptibles de produire respectivement produisent des armes à sous-munitions. Selon I’article 3 de la loi du 4 juin 2009 podant approbation de la Convention sur les armes à sous-munitions « il est interdit à toute personne physique ou morale de financer, en connaissance de cause, des armes à sous-munitions ou des sous-munitions explosives ».
MM. les Ministres de la Sécurité sociale et des Affaires étrangères avouent dans la réponse précitée que le Fonds de compensation achetait à partir d’août 2009 des actions d’entreprises produisant des armes à sous-munitions, donc après l’entrée en vigueur de la loi du 4 juin 2009. Sans doute dans l’intention de faire enlever aux agissements des gérants du fonds de la sécurité sociale tout caractère conscient, constitutif de l’infraction pénale, les Ministres insistent à plusieurs reprises et lourdement sur le caractère non volontariste, mécanique, passif de la politique de placement, et sur l’absence de critères concrets définissant un producteur de sous-munitions. Selon l’article 19 du Code d’Instruction Criminelle, « le ministre de la Justice peut dénoncer au procureur général d’Etat les infractions à la loi pénale dont il a connaissance, lui enjoindre d’engager des poursuites ou de saisir la juridiction compétente de telles réquisitions écrites que le ministre juge opportunes. »
Sur ces bases, je voudrais plus spécialement vous poser les questions suivantes :
1. Une démarche a-t-elle déjà été effectuée pour faire constater une éventuelle infraction à l’article 3 de la loi du 4 juin 2019, respectivement pensez-vous faire procéder à cette démarche prochainement?
2. Ne pensez-vous en effet pas qu’il appartient au Parquet et aux juridictions d’instruction et le cas échéant de jugement – et non pas au Ministre de tutelle
concerné ou au Ministre des Affaires Etrangères – d’évaluer les responsabilités engagées à des niveaux différents: professionnels du milieu financier (gérants, conseillers) ou décideurs politiques, tous ne pouvant ignorer la loi qui s’applique à leur domaine de gestion ou dénier a priori toute connaissance de cause à leurs décisions?
3. L’invocation des « règles de la gestion passive » et de « l’effet mécanique de la réplique » d’un « indice de préférence (MSCI World) » saurait-elle suffire à elle seule à mettre les gestionnaires des actifs de la sécurité sociale à l’abri de toute responsabilité, à renoncer à toute instruction pénale et à mettre ainsi en cause le principe d’égalité devant la loi et donc la crédibilité même de notre ordre constitutionnel ?
4. Comme il n’est pas exclu que d’autres institutions – notamment dans le secteur financier – soient impliquées (« sciemment » ou non) dans des placements illicites selon la loi du 4 juin 2009, quelles sont les mesures envisagées par le Gouvernement pour empêcher toute transgression de la loi de 2009 par quelque acteur que ce soit et d’appliquer, le cas échéant, les sanctions prévues par cette loi ?
En vous remerciant d’avance, Monsieur le Président, ainsi que Monsieur le Ministre, je vous prie d’accepter l’expression de ma très haute considération.
André Hoffmann
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